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EWPF / Portrait de Fanny Rodriguez, Membre du board de l’AFEPAME et de l’ETPPA, SG et COO de FINTECTURE.

« Avec la DSP3, on s’approche davantage de la révolution que de l'évolution »

Notre série de portraits de ces femmes actives et engagées continue avec l’interview « DSP3 » de Fanny Rodriguez, Membre du board de l’AFEPAME et de l’ETPPA, SG et COO de FINTECTURE.

EWPF : Pouvez-vous présenter votre parcours professionnel et ce qui vous a amené à travailler dans le domaine des paiements ?

Fanny Rodriguez : Je viens du monde de la banque d’investissement, mais j’aime changer d’environnement, que ce soit de secteur d’activité ou de thèmes. En travaillant au sein d’une grande banque, j’ai découvert les paiements, et l’excellente surprise de constater que les paiements sont intimement liés aux nouvelles technologies, tout ce qui est numérique. J’inter-venais alors sur le sujet DSP2 en contact direct avec les fintechs puisqu’il fallait construire des API pour leur permettre de se connecter aux comptes de la banque. Suite à cette expérience, j’ai eu envie de rester dans les paiements. Fintecture, Fintech indépendante, développe une offre BtoB sur un marché en forte croissance.

EWPF  : Quelles sont vos responsabilités en tant que COO et Secrétaire Générale de Fintecture ?

F.R : Je supervise tout ce qui est fonction corporate de l’entreprise, risques et compliance, juridique, ainsi que la coordination avec les RH et la finance. Fintecture est un établissement de paiement régulé, le besoin de vision sur la réglementation est nécessaire, pour anticiper l’impact et la mise en œuvre des textes. Fintecture innove, crée des produits, il existe donc une contrainte technique et en même temps réglementaire. C’est un véritable challenge au quotidien !

« Avec la DSP3, on s’approche davantage de la révolution que de l’évolution  »

EWPF  : En faisant le bilan de ces 5 dernières de la mise en application de la DSP2, que peut-on dire des réussites ?

F.R : C’est d’abord grâce à la DSP2 que Fintecture existe ! La première réussite c’est l’opportunité d’un nouveau marché c’est-à-dire le paiement par virement pour les commerçants ; avant la DSP2 c’était quasiment impossible. Le virement fonctionnait souvent avec des listes de bénéficiaires dans les banques. Plusieurs entreprises ont été créées grâce à la DSP2, ainsi qu’un écosystème parfois sous-estimé car assez récent.

Pour la 2ème réussite, la DSP2 a permis de faire communiquer des acteurs qui échangeaient peu entre eux, les banques et les start-ups, le monde de la sécurité et des serveurs internes avec le monde du cloud, du parcours client. Ce sont 2 environnements construits différemment qui se sont retrouvés autour de la table.

Enfin, le troisième axe de réussite concerne le client. Il dispose d’un nouvel éventail de moyens de paiement. Avant la DSP2, c’était pour ainsi dire ‘principalement la carte, voire le chèque et le cash’. Le client dispose désormais de plus de choix avec le développement des nouvelles technologies.

EWPF  : Cette rencontre entre ces 2 mondes s’est faite grâce aux API, peut-on parler d’une réussite ?

Les API ne sont pas encore totalement parfaites car elles se sont construites dans la douleur, les banques n’avaient pas d’intérêt à l’arrivée de la concurrence sans contre-partie. Leur mise en place a été couteuse pour les banques mais aussi pour les nouveaux acteurs, qui avaient souvent des budgets limités, et réduisant de fait leur capacité d’innovation et de création. Se pose aussi la question du modèle économique pour les banques qui ont dû ouvrir gratuitement leur système et mettre à disposition des API pour les fintechs. Il existe probablement une collaboration à inventer par le biais de partenariats d’acteurs. Est-ce que la solution ne serait pas des API premium ? Un socle gratuit et la possibilité de rajouter des fonctionnalités payantes derrière. Il semblerait que ça ne soit pas pour tout de suite en France. En revanche, ce modèle va exister ailleurs, comme en Allemagne. Il reste encore des axes d’amélioration pour les API, qui devraient s’inscrire dans le cadre de la DSP3, et pour la collaboration banques et Fintech.

EWPF  : Avant d’évoquer la DSP3, pouvez-vous nous dire comment est vécue la DSP2 par vos partenaires / clients ?

F.R : Très bien ! Le commerçant souhaite que le client final paye sans difficulté, quel que soit le moyen de paiement. Le paiement par virement bancaire peut être complémentaire de la carte, notamment pour les gros paniers. Pour certains produits et types de parcours, payer par virement permet de répondre à des attentes où il n’y avait pas de solution simples avant, notamment grâce à un très faible taux de fraude.

EWPF  : En parlant de fraude ? Quelle est votre approche ?

F.R : Pour Fintecture, la lutte contre la fraude est un sujet central, l’objectif étant d’offrir un moyen de paiement à la sécurité optimale. Quelles que soient les responsabilités de chacun, l’investissement dans des dispositifs de lutte contre la fraude est essentiel. Les fintechs ont un rôle dans l’analyse des comportements, l’idée étant d’avoir une approche complémentaire de celle de la banque. Nous pouvons être plus fort à 2 dans la lutte contre la fraude.

EWPF  : Dans la continuité de la DSP2, la DSP3, quelle est votre vision des changements à venir ?

F.R : D’après la commission européenne ‘la DSP3 est une évolution, pas une révolution ». Dans les faits, la DSP3 va être complétée par 3 règlements  : sur les services de paiement, sur l’open finance et sur l’euro digital. En parallèle, un règlement sur le virement instantané est en cours d’adoption. La combinaison de ces 5 textes fait que l’on s’approche davantage de la révolution que de l’évolution…

EWPF  : Quels sont les jalons de la DSP3 ? que savons-nous actuellement ?

F.R : Le 28 juin, 4 textes ont été officiellement publiés. Nous savons que l’objectif est une adoption avant les élections européennes, donc assez rapide. Il existe des points dans les textes qui devraient contribuer à améliorer la partie technique, comme le fonctionnement des API. Autre sujet important, l’opportunité donnée aux établissements de paiement (EP) d’accéder aux infra-structures de paiement, pour l’instant réservée aux banques, bien entendu, à la condition que les « EP » respectent les mêmes conditions que les banques. L’euro digital offre également des opportunités.

EWPF  : Comment a travaillé le régulateur pour la préparation de la DSP3 ?

F.R : Le régulateur a consulté en amont. La Commission a man-daté un cabinet pour faire un bilan de la DSP2. Les fintechs et les banques ont active-ment contribué à cette étude d’impact.

EWPF  : Quelles sont vos attentes sur les prochaines évolutions réglementaires ?

F.R : Notre principale attente est d’avoir un maximum de coopération avec tous les acteurs régulés de la place pour renforcer la lutte contre la fraude. Nous rencontrons des difficultés à concilier prévention de la fraude et protection des données prévues dans le GDPR car parfois, protéger les données revient à protéger le fraudeur. Une autre attente forte est de finaliser le travail sur les API en Europe afin que l’OPen Banking et l’Open Finance se développe dans un environnement optimal.

Propos recueillis par Virginie Mainczyk.


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