Hervé SITRUK, Président, FRANCE PAYMENTS FORUM

Après une période de débats, plusieurs pré-consensus semblent émerger en Europe, autour de trois grandes questions qui feront l’objet d’une règlementation : l’Instant Payment, l’euro numérique et la révision de la DSP. La période qui s’ouvre sera celle d’un débat démocratique majeur, surtout à la veille des élections européennes de juin 2024.

Mais ces élections à venir risquent  de reporter l’organisation des trilogues conclusifs, au moins sur les deux derniers sujets.

 

  1. Le virement SEPA instantané (« SEPA Instant Payment » ou IP)

La proposition de règlement sur le virement instantané publiée par la Commission européenne le 26 octobre 2022 est apparue dans un premier temps comme peu consensuelle, dans la mesure où elle abordait la question tarifaire et fixait une règle d’acceptation obligatoire pour les PSP européens. Autant la promotion de l’Instant Payment comme le nouveau moyen de paiement aux côtés de la carte, voire comme un futur “new normal” pour les virements, semblait justifiée, autant traiter dans un règlement des questions opérationnelles et économiques pour favoriser l’adoption d’un Instrument remettait en cause la sacro-sainte neutralité réglementaire entre les divers instruments de paiement.

Comme l’a rappelé Eric DUCOULOMBIER, lors de la plénière mensuelle de FRANCE PAYMENTS FORUM du 23 mars dernier, pour la Commission européenne, « la finalité, derrière ce texte, est d’accélérer et de faciliter la migration vers les virements instantanés, parce que le marché, à notre goût, a été un peu trop lent dans la mise en œuvre du virement instantané. Et il y a des opérateurs, comme EPI, des Fintechs, des commerçants, des consommateurs, toute une communauté, qui attend que l’usage du virement instantané soit plus répandu. », lors de  la présentation du projet aux colégislateurs, Conseil et Parlement européen, « Nous avions t quelques inquiétudes, mais, finalement … les Etats membres (et le Parlement européen) ont vu derrière cette initiative, l’ambition politique : en effet, ce texte n’est pas qu’un texte technique pour faire que les virements soient plus rapides, il y a derrière bien évidemment une finalité politique, en termes de concurrence, d’innovation, et  d’indépendance stratégique de l’Union européenne, et cela a été bien compris. », et d’ajouter : « Le Conseil s’est penché sur chacune des dispositions, et a proposé des ajustements, mais cela, on s’y attendait et c’est bien naturel…. Le Conseil joue pleinement son rôle ». Et le Parlement aussi.

Et comme l’a rappelé Bastien LAFON à cette même occasion, du côté des représentants des Etats (en France, la Direction générale du Trésor), l’objectif est de « tenir les deux bouts », « c’est-à-dire (a) de faire en sorte que le virement instantané se développe et (b) de permettre à toutes les solutions innovantes de se développer sur le paiement instantané ». D’où certaines réserves et propositions d’ajustement du projet initial, comme sur le service de vérification de la concordance entre l’IBAN et le nom du bénéficiaire (confirmation of payee), sur le volet économique, sur le cadre des sanctions.

D’un autre côté, les établissements bancaires européens, soucieux d’avancer sur la mise en œuvre de l’IP et le lancement d’EPI 2, recentré à court terme sur une solution unifiée de paiement instantané de compte à compte, mais qui s’étendra progressivement aux paiements de particulier à professionnel, aux achats en ligne, puis aux paiements en point de vente, ont reconsidéré leur position, pour rechercher un compromis acceptable avec la Commission. Ainsi, comme l’a indiqué Jérôme RAGUENES la Fédération Bancaire Française « a réaffirmé son plein soutien au projet de la Commission Européenne, même si certaines dispositions du projet seraient à revoir, notamment sur le volet économique » et rappelé que « les banques françaises sont pleinement engagées dans la réussite du projet de déploiement de l’IP »,. Bien sûr, là aussi des propositions sont faites, et des réserves de précaution sont émises comme sur certains délais accordés pour la mise en place de la solution et pour déployer les paiements de masse (bulk payments).

De son côté EPI a émis un communiqué de soutien à l’initiative de la Commission Européenne. Comme l’a indiqué Martina WEIMERT « C’était pour nous extrêmement important car (1) nous y croyons très fort et (2) nous souhaitons soutenir les travaux de la Commission. Nous avons bien sûr encore quelques interrogations ou la volonté de modifier certaines choses, notamment sur l’AML, et nous avons aussi été très clairs sur le fait que nous demandons un business model viable (la Commission le sait et travaille dans ce sens) ». Et elle a indiqué : « Il est crucial que l’Europe réussisse là-dessus, car c’est la possibilité pour construire un système alternatif aux cartes en Europe. ». Eric DUCOULOMBIER a d’ailleurs salué le communiqué d’EPI: « C’est un texte que j’aurais pu écrire moi-même tellement je suis satisfait de son contenu ». « On peut discuter bien évidemment d’un point ou d’un autre, mais la teneur globalement de ce message est très favorable. Je ne vais pas dire que le texte ne va pas être aménagé en fonction des situations. On essaie de garder au mieux l’église au milieu du village. Et là, tout le monde a bien compris cet impératif ».

Le document de position de FRANCE PAYMENTS FORUM sur l’Instant Payment revient sur le consensus préexistant dans la Stratégie européenne pour les Paiements de détail, pour que l’IP soit une brique essentielle à la création de l’espace unique européen et souverain dans le domaine des paiements, et justifie donc d’une règlementation pour en accélérer le déploiement. Mais, il insiste sur plusieurs points : « Bien que construite autour d’arguments pertinents, la proposition de règlement semble ignorer que l’itinéraire pour y parvenir est plus complexe qu’il ne l’a été présenté. De plus, une telle règlementation introduit une discordance de concurrence entre instruments de paiement (notamment entre IP et SCT), difficilement justifiable. Dès lors, FPF considère que l’articulation avec les réglementations concernant les autres instruments de paiement, y compris le futur euro numérique, devrait être plus importante et dûment coordonnée dans le cadre de la révision de la DSP. Enfin, le calendrier devra mieux tenir compte de ces questions opérationnelles, à défaut d’apporter plus d’éléments pour y répondre ». Et il propose de « parfaire le scheme de l’EPC » par un « Rulebook construit autour de cinq vecteurs organisés : (1) des modalités opérationnelles de la transaction, (2) un marketing plus présent, (3) un modèle économique précis, (4) une logique de maîtrise des risques, et (5) un cadre juridique adapté ». Ainsi, pour la première fois, ce document de position introduit une logique d’articulation entre les divers moyens d’organisation dans le domaine des paiements, en proposant de clarifier ce qui relève de la règlementation juridique, directive ou règlement, des standards et règles techniques tels que pris en compte dans le « scheme » de l’EPC, mais aussi de la « règlementation contractuelle » que pourrait offrir un « scheme » complet.

En bref, le projet de règlement de la Commission sera amendé, mais, un réel consensus existe déjà entre les pouvoirs publics, européens et nationaux, et les acteurs du marché, sur les enjeux de ce projet et la nécessité de le faire aboutir. Et l’annonce faite le 25 avril de lancement

  1. L’euro numérique

Le projet d’euro numérique conduit par la BCE et l’Eurosystème fait débat, et si un consensus semble se dessiner, c’est d’abord entre les acteurs « règlementaires » (Commission et colégislateurs) et les acteurs du marché (notamment les acteurs bancaires et le monde du commerce et des entreprises). Ce consensus qui semble émerger couvre trois volets : (1) les uses cases prioritaires (2) la nécessité de laisser la main au marché et de ne pas mettre en cause le dispositif de paiement européen existant et les capacités d’innovation, (3) la nécessité d’une règlementation européenne complète sur tous les volets du projet, et les enjeux d’un débat démocratique.

Rappelons tout d’abord que l’Eurosystème ne s’est pas auto-saisi du sujet, mais à répondu à la demande insistante des acteurs règlementaires sur l’émission d’un euro numérique. Cette demande faisait suite aux « menaces » (en tous cas, perçue ainsi) du lancement d’un stablecoin, Libra, ou de monnaies numériques d’autres zones monétaires, tous à vocation internationale, qui pourraient remettre en cause la place de l’euro en Europe et au niveau mondial, et la souveraineté européenne. Et le rapport BCE d’octobre 2020 sur un euro numérique concluait : « Vu les avantages potentiels d’un euro numérique et l’évolution rapide de l’environnement des paiements de détail, l’Eurosystème doit être à même d’émettre une telle monnaie à l’avenir ». Ce rapport a été en son temps salué par de nombreux acteurs du marché, dont FRANCE PAYMENTS FORUM, au nom de la souveraineté, mais aussi de sa contribution potentielle au développement d’un grand marché européen des cryptopaiements.

Rappelons aussi la position historique de la Commission européenne sur l’émission des monnaies électroniques. Il y a 20 ans, la Commission a opposé un refus à la demande de certaines banques centrales européennes d’émettre une monnaie électronique de détail, au motif qu’il fallait laisser cela aux acteurs du marché. Ce refus a sonné le glas des ambitions de l’Eurosystème en termes de monnaie électronique. Vingt ans après, l’opportunité se présentait à nouveau de disposer d’une monnaie électronique de détail. Et la demande émanant des acteurs réglementaires d’envisager l’émission d’un euro numérique peut, d’un certain point de vue, s’interpréter comme une « revanche » de l’Eurosystème.

Mais, le nouveau projet de l’Eurosystème sur l’euro numérique a évolué de l’émission d’une monnaie pour des transactions de détail à l’émission d’un ou plusieurs nouveaux instruments de paiement (carte physique, wallet, …), couvrant jusqu’à plus de 60 « cas d’usage ». De plus la menace que représentait Libra (rebaptisé Diem puis abandonné début 2022) s’est estompée. Et les travaux en cours de l’Eurosystème ont bien cherché à limiter la détention d’euro numérique par les particuliers, en suggérant un seul « compte » euro numérique par personne, et une limite de détention pour ne pas concurrencer les acteurs bancaires du marché, ont bien répondu aux orientations des colégislateurs.

Toutefois les options retenues à ce jour dans le cadre du projet d’euro numérique, notamment le mécanisme dit de «reverse  waterfall », permettant de réapprovisionner « la poche de liquidité » après chaque transaction, ou bien les nombreux cas d’usage qui dupliquent ceux des instruments de paiement scripturaux existants, ainsi que l’option  technique visant, pour des motifs de sécurité, à faire transiter chacune des transactions par les ordinateurs centraux de la BCE, et bien d’autres options encore, ont fini par dissuader de nombreuses bonnes volontés, voire par susciter la méfiance, comme en matière de confidentialité des données, contraignant la BCE  à réaffirmer que  « L’euro numérique n’est pas un « big brother » visant à surveiller les européens ».

Un autre point qui a pu provoquer des inquiétudes a été le rappel des rôles respectifs de la Commission et des colégislateurs d’un côté, et de l’Eurosystème de l’autre. Certains propos de M. Fabio PANETTA ont pu être compris, à tort, comme réduisant le rôle du Parlement à celui d’une « chambre d’enregistrement », alors qu’il évoquait des sujets clés comme le cours légal ou la confidentialité. Dès lors, la Commission et chacun des colégislateurs ont rappelé que la décision d’émettre (ou non) un euro numérique appartenait au législateur et sera prise à l’issue d’un grand débat démocratique, et que le domaine prioritaire des travaux de la BCE concernait la sécurité et divers points techniques. A la veille des élections européennes, cette exigence apparaissait incontournable. Mme Lagarde y a réagi en demandant aux colégislateurs d’aller vite, en rappelant les échéances de l’Eurosystème, et rappelait que la décision de poursuite des travaux à l’automne 2023 ne valait bien sûr pas décision de lancement de l’euro numérique, qui appartient bien aux colégislateurs.

Enfin, au sein de l’Eurosystème un débat s’est ouvert sur l’opportunité d’émettre par ailleurs un euro numérique pour les transactions interbancaires et de paiement de gros montants (« wholesale »). Et les expérimentations menées en la matière par la Banque de France, pourtant couronnées de succès et montrant la pertinence de l’euro numérique de gros, notamment pour le règlement final des transactions sur actifs numériques, ont longtemps été ignorées par la BCE.

Mais c’est la crainte de concurrence entre la monnaie numérique de banque centrale et les monnaies scripturales et électroniques des banques commerciales et autres PSP, soulignée dès l’origine, qui met le feu aux poudres. Cette crainte s’est amplifiée et a trouvé un écho fort auprès des Pouvoirs publics européens. Elle s’est cristallisée sur l’opposition entre les projets d’euro numérique mené par la BCE et les mesures visant à accélérer le déploiement de l’IP, soutenues par la Commission européenne et tous les acteurs du marché et qui figurent au centre de la stratégie européenne pour les paiements de détail (RPS). Ainsi, Eric DUCOULOMBIER a signalé « une prise de conscience pleine sur les enjeux et les risques » au plan politique : « les discussions sont vives, et il y a des Etats membres et pas des moindres, qui font valoir des points très justes, comme sur le risque qu’il pourrait y avoir s’il y avait une concurrence de l’euro digital avec des instruments privés, avec des conséquences peut être incalculables ». Et pour EPI, la concurrence entre le wallet EPI et le wallet « euro numérique » serait un jeu inégal, le second bénéficiant du cours légal, donc la possibilité d’avoir un réseau d’acceptation obligatoire, alors qu’EPI devra construire le sien. Ce qui le mettrait en porte-à-faux vis-à-vis des commerçants qui devront à un moment donné faire le choix de ce qu’ils devront implémenter, entre les deux, même si EPI arrivera plus tôt. Du côté des banques, Jérôme RAGUENES a bien insisté sur « l’incohérence entre le projet de la Commission européenne de déploiement massif du virement instantané, déjà inscrits dans la Retail Payments Strategy, et celui de la Banque Centrale Européenne de déploiement aussi massif de l’euro numérique, projets qui se font concurrence : « on a presque une opposition de logique et de stratégie entre ces deux projets ».  Enfin, Bastien LAFON a souligné que les ministres de l’Eurogroupe ont insisté sur la nécessité de trouver un « narratif » clair, avec les vrais bénéfices identifiés, de l’euro numérique qui soient facilement communicables aux citoyens européens, le message sous-jacent étant que l’ancrage monétaire (qui est un points-clés, à juste titre, de la BCE) ne peut pas être le seul argument utilisé à destination du grand public.

Ainsi, on voit se profiler un consensus sur ce sujet de l’émission d’un euro numérique de détail, plutôt en opposition avec le projet de l’Eurosystème, entre tous les acteurs règlementaires et économiques, autour de trois propositions :

  • L’importance de l’équilibre entre le secteur privé et le secteur public, avec l’exigence d’une co-élaboration de la distribution de cette monnaie publique, et la nécessité de ne pas mettre en cause ni le dispositif de paiement existant au plan européen, ni le rôle des banques dans la distribution du crédit et les dépôts, ni d’obérer le développement de l’innovation dans les paiements ;
  • La nécessité de trouver le bon modèle économique, point essentiel pour que l’euro numérique soit bien commercialisé et qu’il soit effectivement adopté ;
  • L’existence de cas d’usage clairs et prioritaires pour l’euro numérique interbancaire et de gros ; et l’absence de cas d’usage clairs et d’une urgence quelconque à court terme pour l’euro numérique de détail. Ce dernier apparait davantage comme un projet pour la fin de la décennie.

Trois autres points sont aussi consensuels :

  • L’importance de poursuivre les travaux de l’Eurosystème pour disposer à terme d’un cadre consensuel et de faire face, le cas échéant, aux menaces nouvelles qui pourraient apparaître ;
  • L’acceptation des décisions « politiques » sur l’émission d’un euro numérique, et même dès à présent, le lancement des travaux préparatoires et exploratoires pour la mise en place de cet euro numérique ;
  • L’importance d’un débat démocratique pour une acceptation universelle de l’euro numérique, comme ce fut le cas pour l’euro.

Ainsi, EPI a-t-il rappelé qu’il avait élaboré un prototype pour l’intégration de l’euro numérique, ce qui signifie qu’il a travaillé avec la BCE sur la possibilité d’intégrer la fonctionnalité de l’euro numérique dans l’application d’EPI. Pour mémoire, EPI faisait partie des cinq prestataires retenus par l’Eurosystème pour travailler chacun sur un cas d’usage différent : EPI devait travailler sur le commerce physique. Cela a permis à EPI de démontrer qu’il était capable de le traiter.

Pour toutes ces raisons, la publication par la Commission européenne de sa proposition de règlement sur l’euro numérique, annoncée pour le 28 juin prochain, est très attendue. Et le rapport commandé par le Comité économique et financier du Parlement européen sur ce sujet se conclut ainsi : « The concluding judgment is broadly positive on the preparatory work but doubtful on the wisdom of eventually launching a digital euro ».

  1. La révision de la DSP

La révision de la DSP est le troisième sujet d’actualité. La Commission européenne a lancé en mai 2022 le chantier d’une nouvelle révision de la Directive sur les services de paiement, dénommée DSP3.

Sur ce sujet, l’Autorité bancaire européenne a établi un bilan de la directive existante, donné son opinion sur les axes techniques de sa révision, et mis en avant « in detail more than 100 distinct issues and eventually developed more than 200 proposals across the nine different sections ». On peut notamment citer la fusion de la DSP et de la Directive sur la monnaie électronique, ou la clarification des modalités d’application de l’authentification forte, sans oublier la levée des obstacles à la mise en œuvre des règlements relatifs à l’initiation de paiement et aux services d’information sur les comptes, notamment la question des API DSP2, et enfin, l’extension de l’Open Banking à l’Open Finance. Il est probable que ces propositions seront prises en compte dans le futur projet de directive de la Commission Européenne, dont la publication est également annoncée pour le  28 juin prochain.

Depuis l’adoption de la DSP2 en 2015 (il y a  huit ans), la Commission européenne n’a pas chômé, y compris dans des domaines parallèles aux paiements, tels que la lutte contre la fraude et de blanchiment, les sanctions interétatiques,  la confidentialité des données, l’identité numérique, les de paiements internationaux … et plus généralement avec deux textes majeurs : la Stratégie des paiements de détail (RPS) et le « paquet » sur la finance digitale, notamment avec le Digital Services Act (DSA) et le Digital Market Act (DMA), le  Digital Operational Resilience Act (DORA) et encore dernièrement, avec le projet de règlement sur l’Instant Payment.  Tous ces règlements impactent fortement le domaine des paiements ou y font référence.

Le consensus existe sur la nécessité de retirer ou d’ajuster les dispositions de la DSP qui se sont avérées non pertinentes, et de rester très centré sur les paiements, par exemple en évitant de mélanger Open Banking et Open Finance, mais aussi de reprendre tous les sujets adjacents évoqués ci-dessus, de façon à disposer d’un cadre d’ensemble cohérent et stable pour la prochaine décennie.

La DSP3 devrait avoir pour objectifs :

  • De gommer les imperfections de la DSP2 en approfondissant certains sujets à la lumière de l’expérience, comme l’authentification forte et l’Open Banking dans les paiements ;
  • De prendre en compte la stratégie des paiements de détail et les évolutions survenues dans les paiements durant ces cinq dernières années, avec notamment la poursuite de la croissance de la carte bancaire, l’accélération du déploiement du paiement instantané (IP), les réflexions sur le lancement de l’euro numérique ou les développements sur les cryptopaiements ;
  • De parfaire le marché unique des paiements, à la fois sur l’intégration du marché européen pour éliminer les fragmentations nationales, sur la consolidation des acteurs européens des paiements, sur l’innovation, et sur le concept de souveraineté européenne dans les paiements, qu’il convient de réviser au regard des évolutions du contexte géopolitique.

Mais un autre consensus est clair : la future DSP3 devra respecter le choix laissé au marché des instruments et solutions de paiement, et offrir un cadre équilibré.

Ensuite, les points de vue des divers acteurs peuvent diverger et sont plus centrés sur certaines préoccupations particulières : ainsi, pour les banques, l’objectif est d’éviter de remettre en cause les investissements réalisés depuis 2015, et d’intégrer dans la Directive la place des « schemes » pour la définition de règles contractuelles complémentaires des règlements.

Pour les colégislateurs, de nouveaux objectifs sont à prendre en compte :

  • Adopter un cadre légal qui permette à l’innovation de transformer les usages et les pratiques, liés aux changements technologiques profonds,
  • Et faire en sorte que les nouveaux actifs de paiement (cryptoactifs, monnaie électronique…) et les autres types de supports (wallets) ou d’utilisations liées à la technologie blockchain, soient encadrés.

Enfin, la Commission insiste sur le sujet de l’authentification forte, compte tenu de nouvelles pratiques de fraude visant à contourner la règlementation par capture des éléments auprès des utilisateurs. Sur ce sujet les banques, notamment françaises ont de nombreuses propositions.

Pour FRANCE PAYMENTS FORUM, cette révision de la DSP doit être l’occasion d’un saut qualitatif majeur, notamment en termes de sécurité, de suppression des limites nationales au moins dans le cadre de la lutte contre la Fraude, de soutien à la création de champions européens dans les paiements, et d’aide à l’installation de Fintechs.

Conclusion

Ainsi, sur ces trois chantiers règlementaires, Virement SEPA instantané, euro numérique et révision de la Directive sur les Services de Paiement, des convergences fortes apparaissent entre les acteurs majeurs en Europe et devraient permettre d’aboutir à des règlements consensuels, et permettre à l’Europe des paiements et aux acteurs européens à la fois de résister aux assauts des concurrents internationaux, et de promouvoir l’industrie européenne des paiements. En tous cas, FRANCE PAYMENTS FORUM y contribuera activement.